Portrait pro – Barbara, la seconde main dans la peau
Un dépôt-vente où il fait bon flâner – La seconde main comme un acte protestataire – Donne du style à ses clients –
Comptoir chiné, antique armoire repeinte en vert amande, présentoirs d’époque ou fabriqués main, passer la porte de Fait et Affaire, le dépôt-vente de Barbara, c’est remonter dans le temps. Sourire et regard franc, on accueille ici le visiteur avec convivialité et gaieté. Vêtue pour l’heure d’une veste orangée et d’une robe fourreau noire, Barbara, élégante en toute saison, aime jouer avec les styles, la mode et les accessoires, comme un contrepied à la vie et aux injonctions. Rebelle ? Plutôt anticonformiste et totalement lucide…
Franchie la porte, la clochette tinte, à l’instar des commerces d’antan. Ding, ding, vous plongez dans le monde enchanteur de Barbara ! « Bonjour et bienvenue ! Bonne découverte, la boutique se prolonge à l’étage ! ».
De sa voix chaleureuse, Barbara dresse un aperçu des lieux, incitant chacun à déambuler dans sa « caverne d’Ali Baba », comme bon lui semble, parfois réconforté par un petit café, siroté en bonne compagnie.
Sur les étagères et les portants, tous les styles et toutes les époques sont représentés ! Si le regard papillonne, les mains apprécient la qualité des cuirs anciens et des étoffes d’hier, « De la pièce vintage aux griffes de créateurs en passant par les marques plus usuelles ». Sacs, accessoires, bijoux, pulls, chemisiers, robes… dans une mise en scène qui donne libre cours à l’élégance et à la singularité, Barbara affiche sa philosophie de vie, qui n’a rien d’anecdotique…
Mode & seconde main, un art de vivre familial
Depuis sa plus tendre enfance, Barbara aime s’affranchir gentiment des règles, et très tôt ce penchant se manifeste dans ses tenues ! À l’école maternelle, sur les photos, Barbara pose avec classe. Le petit détail en plus, le pull croisé sur les épaules ou le bandana noué : la petite fille se change même chaque midi, histoire de varier les plaisirs…
Ce goût pour les belles matières et les vêtements, Barbara le tient de sa mère, elle aussi amoureuse de l’habillement : « […] sa première paie, maman l’a dépensée dans un pull Shetland […] », confie-t-elle, rieuse, avant de raconter les dimanches aux puces de Saint-Ouen avec ses parents, plus tard, et toutes ces merveilles étalées devant ses yeux, qui ont posé son éducation et affiné sa sensibilité : « […] les stocks de vêtements américains, à l’époque, faisaient un carton ! J’y ai acheté une veste en daim, une autre en jean que je porte toujours, sans oublier les meubles et objets de brocante […] ».
De cet esprit familial libre et ancré dans le réel, Barbara a conservé le sens du labeur et de l’autodétermination. Deux qualités qui selon elle, l’ont guidée toute sa vie : « […] mon père, d’origine italienne, nous disait toujours de retrousser nos manches ! Cette expression peut paraître désuète, mais au sens propre, c’est tellement juste. J’ai toujours su que je m’en sortirais car j’ai toujours relevé mes manches, justement. Se lever à « 3 du » ? Pas de souci ! […] grâce au travail, on acquiert une forme de liberté […] » place-t-elle avec conviction.
Saisir les virages de l’existence
Aussi, quand Barbara, des décennies plus tard, après 17 ans passés auprès d’Air France, entend parler d’un plan de départ anticipé, son esprit frondeur et son désir d’indépendance reviennent sur le devant de la scène…et elle n’hésite pas une seconde à changer de cap !
« […] nous étions à la cantine. Là, entre deux bouchées, un collègue évoque les modalités offertes par l’entreprise. Trois secondes avant, je n’en savais rien, j’étais très épanouie dans mon travail, et pourtant j’ai dit immédiatement « je vais le faire » […] le plus drôle, c’est que j’ai immédiatement pensé au dépôt-vente […] » raconte Barbara.
Un revirement incongru ? Que nenni, Barbara cultivant les changements de direction, même chez Air France, où elle évolue successivement à l’enregistrement, au service client, à la formation, aux procédures puis à la Qualité pour « s’affranchir de tout statisme ».
Ce virage, qu’elle n’attendait pas et avait encore moins anticipé, se présente à elle comme l’évidence, « une manière de goûter à une liberté totale d’action », qu’elle vit d’emblée sans crainte et plutôt avec une certaine forme d’excitation…
Affirmer sa personnalité et créer, à son image
Dès février 2016, au bord de la D1001 reliant Paris et Beauvais, Barbara Baldassi ouvre Fait et Affaire, dépôt-vente où marques de luxe, maroquinerie vintage, vêtements de toutes les maisons cohabitent dans une joyeuse mise en scène.
La vieille bâtisse qui accueille ce commerce atypique, dans ce coin rural de la Picardie, n’est pas pour déplaire à la maîtresse des lieux, qui y perpétue son sens inné de l’originalité et de la créativité…pour autant, pas de lèche-vitrines ! Des mannequins, placés à l’extérieur les jours de beau temps, aguichent avec humour les automobilistes…
Mais n’allez pas chercher du sens là où Barbara ne le cherche pas ! Considérations environnementales ? Goût pour le recyclage ? Barbara n’est pas du genre à se mentir et procède à un distinguo clair. En se défendant de tout militantisme pro écologiste, elle prône en revanche une sérieuse envie de construire un univers à son image, hors des habitudes de consommation classiques : « […] je ne pense pas qu’on sauvera la planète juste avec la seconde main, vu qu’on consomme de plus en plus, et quand j’ai ouvert, très sincèrement, je n’ai jamais pensé à cette problématique. Par contre, j’aime me dire qu’on peut ressortir d’ici avec une pièce authentique et originale […] ».
Acheter intelligent…et accessible !
Un coup d’œil à la mise de Barbara suffit pour comprendre son sens de la mode.
Karl Lagerfeld, pour qui l’élégance n’était « ni une question de porte-monnaie, ni de porte-manteau » serait-il son mentor ?
La mordue d’Art Déco rit de cette comparaison : « […] s’habiller, s’est aussi une question de personnalité, d’affirmation de soi, un formidable terrain de jeu. C’est pour ça que je ne me préoccupe jamais de la mode. J’aime composer mes tenues selon mes goûts et c’est dans ce sens que j’accompagne mes clients […] » raconte-t-elle en expliquant comment elle s’émerveille de voir des femmes se transformer juste après quelques conseils et attentions…
Puis soudain, la discussion prend une tournure plus engagée. En habituée des étoffes et des qualités des tissus, Barbara déplore « une baisse évidente de la qualité » et « un très mauvais ratio qualité-prix ».
Les vêtements d’aujourd’hui ne seraient-ils plus ceux d’hier ? Un secret de Polichinelle pour cette amoureuse des années folles et des robes travaillées, des coiffures à la garçonne -terriblement modernes !- et des accessoires au chic incomparable.
Barbara, à bâtons rompus, regrette que les consommateurs soient bernés par des décennies de marketing toxique, ne sachant plus à quelle marque se fier : « […] mettre le prix et avoir un article à la hauteur, d’accord, mais de nombreuses marques vivent sur leur notoriété et non plus sur la qualité du textile […] ».
Au gré des dépôts, Barbara apprend à identifier les plus belles pièces, sans trop considérer les marques. La coupe et le tombé du vêtement, la composition du tissu et sa résistance comptent plus que la griffe, même si elle peut encore être gage de qualité : « […] certains petits créateurs révèlent de belles surprises […] » finit-elle pas dire, avouant qu’elle déserte les magasins des grandes enseignes.
À son petit niveau, Fait et Affaire participe à une sensibilisation douce et pacifiste des esprits, tout en apportant gaieté et joie de vivre.
Barbara, sous son air enthousiaste, sait pourtant se faire critique et un poil protestataire. La détérioration du tissu industriel français, et pas seulement dans le textile, la préoccupe autant que l’appauvrissement de la pensée et du débat public. Les yeux bien ouverts, elle tisse des relations sincères et durables avec ceux qui osent passer sa porte, et perçoit souvent un écho à ses propres convictions, qu’elle porte sans jugement, avec un zeste de pédagogie.
Alors, au détour d’un tasse de thé ou de café, prenez le temps de bavarder et de refaire le monde avec Barbara et dénichez, vous aussi, votre éternel trésor : la pièce que vous prendrez toujours plaisir à porter…et une bouffée d’humanité !
Où trouver Barbara ?
Fait et Affaire – Dépôt-vente, vintage, chaussures, accessoires et vêtements.
3 Hameau de Blainville
60430 Ponchon
Du mercredi au dimanche, de 14h à 19h.
Dépôts sur rendez-vous, en boutique ou à domicile.
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